Tempête Xynthia : le TA de Nantes se prononce sur les responsabilités publiques

Axel Glock | | 23 janvier 2017
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Dans un jugement du 19 janvier 2017, le Tribunal administratif de Nantes a statué sur le partage des responsabilités devant être opéré entre la commune de la Faute sur Mer, l’Etat et l’association syndicale de la vallée du Lay, à la suite des dommages causés par la tempête Xynthia ayant touché le littoral vendéen dans la nuit du 27 au 28 février 2010.

Saisi d’un recours indemnitaire par une société d’assurance, subrogée dans les droits de ses assurés habitant la commune de la Faute sur Mer, le Tribunal administratif de Nantes a, par un jugement en date du 19 janvier 2017, statué sur les conséquences dommageables consécutives à la tempête Xynthia et sur les responsabilités publiques encourues en l’espèce.

Etait principalement en cause , dans cette affaire, la défaillance de la digue « Est », ouvrage en partie implanté sur le territoire de la commune de la Faute sur mer, qui s’est trouvé submergé par les flots lors de la tempête et n’a donc pas été en mesure de remplir son rôle de défense contre la mer.

La juridiction a tout d’abord estimé que la tempête Xynthia ne revêtait pas les caractéristiques d’un événement de force majeure au motif que cette catastrophe, malgré son ampleur et sa violence, n’était ni imprévisible, la commune ayant en effet subi plusieurs épisodes de submersion marine de même nature au cours du 20ème siècle, ni irrésistible.

Le Tribunal administratif a ensuite considéré que les personnes publiques, parties à l’instance, avaient toutes commis des fautes de nature à engager leur responsabilité, notamment dans la gestion, l’entretien et le confortement de la digue « Est ».

S’agissant  en premier lieu de la commune de la Faute sur Mer, le Tribunal, dans la lignée de la Cour d’appel de Poitier, saisie du volet pénal de l’affaire, a écarté toute hypothèse de faute personnelle détachable du service imputable au maire de la commune et à son adjointe à l’urbanisme.

A la suite de quoi, les juges ont relevé que la commune avait commis plusieurs fautes tenant principalement au retard dans la réalisation de travaux de confortement et d’exhaussement de la digue. L’insuffisance de cet ouvrage était pourtant clairement connue des pouvoirs publics depuis 2008. Le Tribunal a également critiqué la commune pour sa carence dans l’exercice des pouvoirs de police municipale et la délivrance de permis de constuire dans des zones particulièrement exposées au risque de submersion.

S’agissant en second lieu de l’Etat, le Tribunal administratif a admis l’existence d’une faute lourde de ce dernier dans l’exercice de son pouvoir de tutelle à l’égard des associations syndicales autorisées supposées gérer et entretenir la digue. Les juge mettent ici en évidence le flou juridique entourant la gestion de cette digue et la multiplicité des acteurs publics intervenant sur celle-ci, difficulté parfaitement connue des services de la préfecture. Il est, de surcroît, reproché à l’Etat d’avoir, par le recours à des données de référence erronées, minimisé le risque de submersion des terrains protégés par la digue dans le cadre de l’élaboration et de l’approbation du plan de prévention du risque inondation, document stratégique destiné à évaluer les zones pouvant subir des inondations.

Enfin, s’agissant de l’association syndicale de la vallée du lay (ASVL), association dont la mission était de réaliser l’entretien des ouvrages de lutte contre la mer comprenant la digue « Est », le Tribunal a estimé que celle-ci, bien que n’étant pas maître d’ouvrage de la digue, avait méconnu son objet statutaire en n’apportant pas son concours matériel, financier ou technique au renforcement de cet ouvrage.

Dans ces conditions, les juges ont condamné in solidum la commune de la Faute sur mer, l’Etat et l’ASVL à réparer le préjudice de la requérante, subrogée dans les droits de ses assurés, faisant droit à l’intégralité de ses demandes indemnitaires.

Point intéressant, le Tribunal a rejeté l’appel en garantie formé par l’ASVL à l’encontre de son assureur au motif qu’à la date de prise d’effet du contrat d’assurance, conclu postérieurement à la catastrophe, l’association avait parfaitement connaissance d’un fait dommageable susceptible d’engager sa responsabilité. La juridiction a ainsi fait droit à l’exclusion de garantie opposée par l’assureur sur le fondement des stipulations de la police d’assurance.