Application de l’article 56-I de l’ordonnance concessions

Axel Glock | | 21 mars 2018
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Le Conseil d’Etat juge que les dispositions du I de l’article 56 de l’ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 relatives à l’indemnisation des frais financiers du concessionnaire ne sont applicables que lorsque l’annulation, la résolution ou la résiliation de la concession résulte d’une décision juridictionnelle intervenue à compter du 31 janvier 2016.

Dans cette affaire, une société avait conclu, en janvier 2006, un contrat de concession avec la commune de Nice. Toutefois, en décembre 2006 sur saisine du préfet, le juge administratif avait annulé la délibération municipale ayant autorisé la signature du contrat et le contrat, dès lors que celui-ci méconnaissait des dispositions du code général des collectivités territoriales (sur l’obligation d’indiquer dans le contrat les tarifs à la charge des usagers et l’incidence sur ces tarifs des éléments déterminant leur évolution – ancien article L.1411-2 du CGCT).

C’est pourquoi, la société avait exercé un recours tendant à la condamnation de la commune à l’indemniser des conséquences de l’annulation de son contrat devant le Tribunal administratif, sur le terrain de la responsabilité à la fois quasi-contractuelle et quasi-délictuelle de la ville (CE, Sect., 10 avril 2008, Société Decaux et Département des Alpes-Maritimes, n°244950).

Saisi de ce contentieux, le Conseil d’Etat a, dans une décision rendue le 9 mars 2018, eu l’occasion d’expliciter le régime d’application des dispositions de l’article 56-I de l’ordonnance « concessions » relatives à l’indemnisation des frais financiers du concessionnaire dans le cas, notamment, d’une annulation de son contrat par le juge.

La Haute assemblée rappelle que l’article 78 de cette ordonnance a prévu l’entrée en vigueur de ces dispositions à compter d’une décision juridictionnelle rendue le lendemain du jour de la publication de l’ordonnance, soit à compter du 31 janvier 2016. Or, en l’espèce, le contrat avait été annulé par le juge administratif dans un jugement intervenu près de dix années plus tôt, faisant, dès lors, obstacle à l’application des dispositions de l’article 56-I précité. Ainsi, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel en ce qu’il avait, à tort, fait application de ces dispositions au cas d’espèce.

Partant, le Conseil d’Etat a examiné la demande d’indemnisation de la société requérante au titre de la responsabilité quasi-contractuelle de la commune au regard de sa jurisprudence selon laquelle : « s’agissant d’une délégation de service public, le co-contractant de l’administration peut prétendre, sur le terrain quasi-contractuel, au remboursement des dépenses d’investissement qu’il a effectuées relatives aux biens nécessaires ou indispensables à l’exploitation du service, à leur valeur non amortie évaluée à la date à laquelle ces biens font retour à la personne publique, ainsi que du déficit d’exploitation qu’il a éventuellement supporté sur la période et du coût de financement de ce déficit, pour autant toutefois qu’il soit établi, au besoin après expertise, que ce déficit était effectivement nécessaire, dans le cadre d’une gestion normale, à la bonne exécution du service public et que le coût de financement de ce déficit est équivalent à celui qu’aurait supporté ou fait supporter aux usagers le délégant ; » (voir l’arrêt de principe CE, 7e et 2e SSR, 7 décembre 2012, Commune de Castres, n° 351752).

Puis, sur la demande d’indemnisation de la société au titre des dépenses exposées et du bénéfice dont elle aurait été privée par l’annulation de la concession, la Haute assemblée a estimé que la Cour administrative d’appel n’avait pas dénaturé son appréciation en jugeant que la responsabilité quasi-délictuelle de la commune ne pouvait être engagée.

CE, 7e – 2e ch. réunies, 9 mars 2018, n°406669